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Maire de Strasbourg, France (Août 2009)
M. Roland Ries
Août 2009. Né en 1945 à Niederlauterbach (Alsace), il a été professeur agrégé de lettres modernes. Il s’engage en politique en 1974, au sein du Parti Socialiste.
Membre du Conseil Municipal depuis 1983, il a été, au début des années 1990, l’artisan du retour du tramway dans l’agglomération strasbourgeoise qui a permis une véritable rénovation de l’espace public de la ville. Ses compétences en matière de déplacement urbain sont reconnues au plan international, notamment au sein du Groupement des Autorités Responsables des Transports, qu’il préside depuis 2008.
Il est Sénateur du Bas-Rhin depuis février 2005.
Homme de culture et de dialogue, Roland Ries place au cœur de son engagement les valeurs humanistes portées par l’histoire de Strasbourg, capitale parlementaire de l’Europe.
Il est très attaché aux démarches de démocratie participative qui permettent aux citoyens de s’impliquer dans les choix de leur Municipalité. Depuis mars 2008, sous son impulsion, la Municipalité strasbourgeoise a mis en place de multiples outils innovants de participation citoyenne.
Roland Ries s’est beaucoup investi dans la réconciliation franco-allemande, socle de la construction européenne. Il a initié un projet de district transfrontalier avec les villes allemandes voisines de Strasbourg et privilégie une vision de l’Europe s’appuyant sur les citoyens, qui rassemble les Européens autour des valeurs de la démocratie et des droits de l’Homme.
Pour lui, Strasbourg doit incarner ces idéaux, dans une ville ouverte au monde, consciente des identités et des diversités qui la façonnent.
1. La ville de Strasbourg a été inscrite sur la Liste du patrimoine mondial en 1988. Quels changements votre ville a-t-elle connus depuis?
Lorsque, en 1988, la Grande-Île est inscrite sur la Liste du patrimoine mondial, le tissu urbain est déjà largement restauré. Un secteur sauvegardé créé dès 1972 a permis la réalisation de nombreuses opérations de restauration immobilières.
Au début des années 1990, nous avons engagé le retour du tramway à Strasbourg et dans son agglomération. Ce choix a été déterminant pour l’évolution de notre centre-ville, car il a permis la rénovation urbaine de la Grande-Île, le recul de l’emprise automobile, une place plus grande aux secteurs piétonniers et un gain important de qualité de l’espace public pour les habitants. Le nouveau plan de circulation, qui interdit la traversée de la Grande-Île en voiture, a très clairement déclenché et permis cette rénovation, qui d’ailleurs va se continuer, ces prochaines années.
2. Quel est votre rôle dans la gestion du patrimoine en tant que maire d’une ville du Patrimoine mondial?
La Municipalité joue un rôle important dans la préservation du patrimoine, à la fois à travers ses outils juridiques réglementant la construction et l’urbanisme, mais aussi à travers ses interventions directes sur la conservation des monuments. Ainsi, à Strasbourg, nous disposons de la Fondation de l’Œuvre Notre-Dame, qui fait un travail remarquable sur notre cathédrale et d’autres monuments prestigieux, tout en pérennisant les savoir-faire et les métiers de la restauration.
Mais, au-delà de ces interventions qui visent à la conservation de notre patrimoine, nous nous servons aussi d’instruments plus classiques pour trouver le point d’équilibre entre la préservation des traces de notre histoire et la nécessité de dynamiser la vie économique, sociale et culturelle du centre-ville. Le cœur historique de Strasbourg est certes très beau et attire de nombreux visiteurs. C’est aussi le cœur touristique et commercial de notre agglomération. Mais, en même temps, c’est de plus en plus coûteux et difficile d’y habiter. Il faut donc que nous veillions à ce que le cœur de Strasbourg reste vivable et accessible aux plus modestes. Notre ambition n’est pas de muséifier Strasbourg, mais bien de concilier le passé, le présent et l’avenir.
3. Quels sont les principaux projets (présents et futurs) de mise en valeur de votre ville reliés au patrimoine?
A l’occasion des 20 ans du classement de la Grande-Île au Patrimoine mondial, nous avons pu réfléchir à nos objectifs pour l’avenir. Bien sûr, nous continuerons nos efforts d’entretien et de conservation des éléments remarquables de notre patrimoine. De même, la dynamique de rénovation urbaine, entamée il y a 20 ans, doit être poursuivie. Nous avons repéré certains espaces secondaires de la Grande-Île, plus éloignés du tramway, qui méritent, à présent, notre attention.
Nos efforts vont aussi continuer, en ce qui concerne le recul de la voiture sur l’espace public au profit des modes doux et actifs de déplacement. Ainsi, le stationnement va disparaître de la Place du Château, située au pied de la Cathédrale. De premières zones de rencontre, où tous les modes de déplacement, sont à égalité, sont d’ores et déjà expérimentées dans la Grande-Île.
Un autre enjeu majeur sera celui de la vitalité du centre-ville. Il faudra que nous utilisions nos outils réglementaires ou fonciers pour favoriser la mixité des fonctions et des usages dans la Grande-Île.
Enfin, la Grande-Île ne doit pas rester une île! J’entends par là qu’il faut que les dynamiques initiées au centre-ville soient mieux connectées avec les quartiers environnants, dont certains portent autant l’histoire de Strasbourg que la Grande-Île. Cela signifiera certainement de revoir notre projet patrimonial, dans le cadre de la reconnaissance au Patrimoine mondial, en y incluant le « Strasbourg impérial » patrimoine urbain hérité de l’époque où Strasbourg était allemande. Dans une perspective où l’histoire doit inspirer l’avenir, valoriser notre histoire franco-allemande et ce qu’elle a permis d’atteindre en Europe est pour nous un devoir.
4. Pourriez-vous parler de la politique des déplacements urbains et le transport dans votre ville?
Notre orientation est claire : essayer de réduire encore la place de la voiture, dévoreuse d’espace et polluante. Depuis les années 1990 et le retour du tramway, on ne peut plus traverser la Grande-Île en voiture. Les parkings périphériques sont situés sur des boucles d’entrée-sortie de la Grande-Île. L’usage de modes de déplacements alternatifs à l’automobile est privilégié et des équipements de stationnement pour le vélo ont été multipliés. Certains secteurs de la Grande-Île ont été piétonnisés, alors que nous commençons l’expérimentation de « zones de rencontre », où les modes de circulation s’équilibrent entre eux.
De ce point de vue, la Grande-Île nous sert de modèle, dont les enseignements pourront inspirer nos choix dans d’autres quartiers de la ville.
Même s’il tient une place importante dans notre politique de déplacement, le tramway n’est cependant pas la solution unique aux enjeux d’une politique moderne de mobilité urbaine. Il est très cher à l’investissement et il ne peut évidemment pas répondre à tous les besoins. Il est pertinent dans certains cas, comme d’autres modes de transport le sont dans d’autres situations.
C’est pourquoi, à l’échelle de l’agglomération, nous travaillons à la diversification des modes de déplacement, en privilégiant les modes doux et actifs, mais aussi à leur intermodalité, c’est-à-dire à la façon dont l’usager va pouvoir passer de l’un à l’autre pour réaliser son trajet.
Nous sommes conscients que seule une offre diversifiée et interconnectée pourra proposer une alternative réelle à la voiture individuelle. Cette action doit inclure bien sûr les offres de transport qui dépassent l’agglomération, comme les liaisons ferroviaires et les transports interurbains.
En tout cas, l’expérience de la Grande-Île nous montre que la valorisation du patrimoine, sa protection et sa découverte implique nécessairement une réflexion sur l’urbanisme et les transports. Nul aujourd’hui à Strasbourg ne conteste plus le fait que la Grande-Île soit peu à peu libérée des voitures !
Au sujet de Strasbourg
- Chef-lieu de la région Alsace et du département du Bas-Rhin. La ville, siège du Conseil de l’Europe.
- Septième ville de France par la population, elle est l’un des principaux pôles économiques du nord-est..
- Population : 272 500 habitants
- Fondation : 496 ans av. J.-C.
- Liste de l’UNESCO : 1988
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